La lecture, le plus beau des cadeaux de Noël
Je suis frappée par le peu d’appétence des jeunes pour la lecture. Parmi tous mes élèves, la plupart ne lisent que les livres imposés par l’école, quand ils ne se contentent pas des résumés trouvés sur internet ou ChatGPT. Ils prétendent ne pas aimer lire. Lire leur demande un effort d’attention soutenue intense et vain. Leurs yeux défilent sur les lignes, mais les mots glissent sur eux. Bien souvent, le texte est muet, il ne leur parle pas, ne les fait pas vibrer ni entrer en résonance avec le monde.
Cette généralité – je n’aime pas lire – est un préjugé. Ils devraient plutôt dire : je n’ai pas encore découvert le trésor de la lecture.
Heureusement, la situation peut évoluer. Il suffit d’un livre pour enclencher la spirale positive. Une jeune femme de 25 ans, cadre dans une société d’assurances, m’a raconté combien la lecture avait changé sa vie. Elle s’est lancée à la faveur du confinement. Un roman l’a passionnée, cela lui a donné envie de continuer. Depuis trois ans, elle ne peut plus s’en passer. Quand elle est plongée dans un bon livre, elle a l’impression de voyager dans un autre espace-temps ou d’accéder à la connaissance qu’elle ne faisait qu’effleurer.
Les bienfaits de la lecture sont nombreux. Selon le scientifique Michel Desmurget, la lecture serait l’antidote à la dispersion, le moyen le plus sûr de contrecarrer l’abrutissement généralisé généré par la surconsommation de réseaux sociaux. C’est ce qu’il montre dans son dernier essai, Faites-les lire ! Le goût de la lecture s’acquiert jeune, en famille, par des temps de lecture partagée. Les parents ont un rôle crucial à jouer pour tenter de développer l’appétence de la lecture.
Alors, osons offrir des livres à nos proches pour Noël.
Voici une petite liste non exhaustive et très personnelle de livres qui m’ont inspirée.
Faites-les lire !, Michel Desmurget
Le remède au crétinisme digital. Démonstration implacable des bienfaits de la lecture sur notre cerveau et notre capacité à vivre ensemble
« Depuis l’émergence du langage, l’humanité n’a rien inventé de mieux que la lecture pour structurer la pensée, organiser le développement du cerveau et civiliser notre rapport au monde, le livre construit littéralement l’enfant dans sa triple composante intellectuelle, émotionnelle et sociale. »
La tyrannie du divertissement, Olivier Babeau
Excellente analyse sur l’enjeu de bien occuper son temps libre. Olivier Babeau analyse combien nous sommes passés du loisir qui nous enrichit (culture, sociabilisation…) au loisir qui nous appauvrit et nous isole. Le mauvais usage du temps libre amplifie les inégalités entre ceux qui en tirent profit et ceux qui n’en tirent rien.
Remède à l’accélération, Hartmut Rosa
Court et facile à lire, ce petit livre nous fait découvrir le travail du sociologue allemand Hartmut Rosa sur l’accélération et sa proposition pour sortir de la frénésie ambiante : entrer en résonance avec le monde.
Rendre le monde indisponible, Hartmut Rosa
Hartmut Rosa nous parle de l’impasse à vouloir rendre le monde prévisible et maîtrisable. Autrement dit à le rendre disponible le plus largement possible. Or la vitalité, le contact et l’expérience réelle naissent de la rencontre avec l’indisponible. Les amateurs de football ou de tennis, par exemple, assistent à un match parce que le résultat est incertain, même en cas de forces disproportionnées en présence. Si tout est prédictible, comme on essaie de nous le vendre, alors la vie n’a plus de sel.
Transmettre ou disparaître, manifeste d’un prof artisan, Ambroise Trounyol du Clos
Professeur dans un lycée public, Ambroise Tournyol du Clos analyse sans faux-semblants les raisons profondes de la crise de la transmission. Ce livre nous engage à redécouvrir la nature artisanale du métier d’enseignant, fondé sur l’observation et l’expérience.
Finir prof, Peut-on se réconcilier avec le collège ?, Mara Goyet
Témoignage d’une prof de collège qui aime son métier et partage sa passion, malgré toutes les difficultés. Ses propos pleins de bon sens et drôles redonnent de l’espoir. Enseigner est impossible, mais c’est amusant.
Ma vie avec la Comtesse de Ségur, Caroline Eliacheff
A la lumière de sa pratique de pédopsychiatre, mais aussi de sa passion pour la Comtesse de Ségur, Caroline Eliacheff relit l’œuvre et la vie étonnante de Sophie Rostopchine. Et si ses romans édifiants et surannés délivraient un enseignement révolutionnaire en matière d’éducation, pionniers pour défendre la cause des enfants ?
Le lièvre aux yeux d’ambre, Edmund de Waal
A travers le suivi d’une collection de netsuke, plongée dans le destin glorieux et tragique de la famille Ephrusi, à Paris, Vienne et Tokyo, entre 1880 et 1970. Passionnant récit qui rend compte de l’antisémitisme latent en Europe avant l’arrivée d’Hitler. Glaçant.
Les derniers mondains, Camille Pascal
Leger, savoureux, drôle et tellement français. Ce n’est pas une chronique mondaine, mais une merveilleuse évocation de milieux fermés, aristocratiques, du Faubourg Saint-Germain, des châteaux, qui restent encore aujourd’hui hermétiques et dont Camille Pascal, avec un goût exquis des formules, des anecdotes, sait nous retracer la vie, les grandeurs, les magnificences, mais aussi les misères.
Et toujours, mes deux livres Éloge de la passoire et À la reconquète de l’attention, sur la mémoire et l’attention respectivement, sont disponibles en librairie et en ligne.
Joyeux Noël et bonne lecture !