Le poids des pensées
Trouver un lit pliant pour ma petite-fille, demander à mon fils de vider la poubelle et de changer ses draps, récupérer une lettre à la poste, téléphoner à ma vieille tante malade, passer chez le teinturier, réparer ma lampe de chevet, laver les carreaux, racheter de la lessive, de l’eau oxygénée, relancer mon voisin sur la fuite, répondre aux quatre messages téléphoniques d’hier, réserver une salle de réunion, revoir le titre du programme de formation, trouver des cadeaux de Noël, répéter le chant avant dimanche, retrouver la clé de la cave, voilà ce qui encombre mon cerveau au moment où je rédige cette newsletter.
La charge mentale, c’est l’encombrement de notre esprit par une multitude de petites tâches à accomplir, de préoccupations. Elles n’ont rien à voir avec notre travail et surgissent bien souvent quand on essaye de se concentrer.
La charge mentale, ce n’est pas tout faire, mais tout penser à faire, tout le temps.
C’est le poids des pensées. Et ça pèse lourd …
Ce sont des petits riens, invisibles mais nécessaires au bien-être familial, qui agissent comme des interrupteurs sur la pensée profonde, la concentration. D’autant que ce flot ne s’arrête jamais …. Une pensée chasse l’autre, j’en ai en permanence une dizaine en stock. Et encore, je suis sortie du tunnel des vingt années consacrées à l’éducation de ma famille nombreuse !
Culturellement, historiquement, les femmes sont en première ligne. Les mères encore plus. Elles tentent de déléguer à leur conjoint. S’ils sont d’accord pour mener la tâche, la plupart n’ont pas encore le réflexe de « penser à faire ». La dessinatrice Emma a bien analysé les comportements pernicieux et souvent inconscients des hommes dans la BD Ça se met où ?`
Quelles sont les chiffres de la charge mentale ?
Selon l’Ipsos, 64% des femmes et 36% des hommes se sentent concernés par la charge mentale. Les femmes ressentent une intensité plus forte.
Quelles sont les conséquences ?
Le cumul peut faire déborder la marmite et conduire à un épuisement, voire au burn-out.
La surcharge mentale provoque de nombreuses tensions dans le couple et peut expliquer bien des divorces
Les conséquences sont physiques (douleurs, insomnies, maux de ventre…), cognitives (pertes de mémoire, difficulté d’attention) et émotionnelles (irritabilité, colère, nervosité…)
Comment l’alléger ?
Prendre conscience de la réalité du poids en faisant une Did-It list : lister toutes les tâches accomplies depuis une semaine, et comparer avec les membres du foyer.
Apprendre à flâner, à déconnecter, à « faire rien », à lâcher l’injonction de perfection après lequel on court.
Prendre des bains de nature, se promener, contempler. Cela restaure l’attention agit comme un reset sur les neurones.
Faire une vidange mentale régulièrement : noter pendant 6 mn toutes les tâches à faire et tout ce qui nous préoccupe. Donner une espace physique aux pensées évite qu’elles ne viennent à l’assaut inopportunément.
S’organiser, prioriser les activités en redonnant de l’espace aux taches non urgentes mais importantes pour nous.
Respirer avec la cohérence cardiaque (ou d’autres respirations comme la 4-4-6-2).
Déléguer les tâches domestiques, qui sont généralement mal réparties, en suivant les astucieux conseils d’Emma dans sa BD.
Mieux vivre l’instant présent avec la méthode Vittoz ou la méditation pleine conscience.
Consulter des professionnels, psychologues, médecins ou thérapeutes en cas de trop plein…
Est-ce inéducable ?
L’allongement du congé de paternité, passé à 11 à 28j en 2021 contribue à rééquilibrer le poids de la charge mentale parentale. En 2022, 57 % des femmes estiment accomplir plus de tâches que leur conjoint, mais ce chiffre est en baisse de 16 points depuis 2019. 16% des hommes en font plus que leur femme.
Le sujet de la charge mentale est à la mode. Les lignes bougent, il est bon de prendre conscience des limites de notre cerveau tout puissant. Nous ne sommes pas des machines, notre vulnérabilité fait partie de notre nature humaine, ne l’oublions pas !