Un mental en or
C’est avec regret que nous quittons la parenthèse enchanteresse des JO de Paris.
Certains exploits resteront longtemps gravés dans nos mémoires.
Comme ceux du nageur Léon Marchand, quadruple médaillé d’or en natation. En deux mois, il a quitté l’ombre pour la lumière, est devenu notre nouveau héros national.
Comment ce jeune athlète, encore méconnu du grand public il y a quelques mois, a-t-il pu atteindre une telle performance?
L’entraînement ? Certes, son programme est rigoureux, et ne fait pas rêver : lever 5h, coucher 21h, 4h et 15 km de natation par jour en plus des cours de fac. Les autres athlètes s’entraînent avec autant d’ardeur.
Non, s’entraîner dur ne suffit pas.
La qualité de son coach Bob Bowman ? Oui, certainement. De telles victoires se gagnent à deux. Léon Marchand a trouvé en Bowman l’homme qui a su révéler son potentiel.
Mais quand on l’interroge sur les clés de son succès, Léon Marchand évoque surtout sa préparation mentale, démarrée en 2021 avec Thomas Sammut.
En visionnant cette interview pour Brut [1], je m’attendais à un discours convenu de champion au mental d’acier, de superhéros, de bête d’entraînement qui n’a peur de rien. J’ai été très agréablement surprise par ses propos. Contre toute attente, j’ai découvert que le nageur avait frôlé le burn-out en 2021 et failli arrêter la compétition.
Pour une raison simple : il se mettait trop de pression pour gagner.
« J’avais un peu peur, je ne me sentais pas légitime si je ne ramenais pas une médaille ». La pression de nager pour performer, pour remporter des titres, pour battre des records lui fait perdre le goût de la natation.
Il songe à renoncer. « Je savais que j’étais nageur, mais en dehors de ça je n’avais rien »
C’est par le biais de cette préparation mentale que Léon Marchand apprend à se connaître, à se découvrir et à comprendre son fonctionnement. Le principe : prendre conscience de son conditionnement limitant pour le reconditionner de manière positive et libérer son talent.
Quels pouvons-nous retenir de son témoignage ?
Accepter l’échec : « J’aime bien me dire : qu’est-ce qui se passe si j’échoue ? Et en fait je me rends compte qu’il ne va rien se passer de spécial …. Mes parents m’aimeront toujours autant, j’aurai toujours autant de valeur ».
Sage conseil à diffuser largement aux élèves qui récoltent des mauvaises notes. La valeur de notre personne ne dépend pas de nos résultats. Notre valeur est infinie, inconditionnelle. Et l’échec fait intrinsèquement partie de la progression. Comme disait Churchill : « le succès consiste à aller d’échec en échec sans perdre son enthousiasme ».
Prendre du plaisir, est devenu le mot clé de Léon Marchand. Avant, il était dans la peur de mal faire, et cela ne se passait pas bien. Aujourd’hui, il nage pour le plaisir, et ça change tout. « Maintenant je n’ai plus peur de l’échec. Je suis plus en mode : je profite et j’essaie », « Parce que quand je m’amuse je peux faire tout ce que je veux, j’ai aucune limite quand je m’amuse ». Pour les élèves aussi, le plaisir d’apprendre est capital. Simone Weil le disait déjà : « la joie d’apprendre est aussi indispensable aux études que la respiration aux coureurs »
Se connaître et s’aimer soi-même : Timide, réservé et défini par sa discipline par le passé, Léon Marchand sait désormais qui il est « en tant qu’être humain et pas en tant que nageur seulement ». « Avant je savais que j’étais nageur, mais en dehors de ça je n’avais rien. J’étais un peu perdu », se souvient-il. « Avant je ne m’aimais pas autant que maintenant, je me sentais timide etc. Avant c’était un désavantage. Maintenant c’est une force, ça me permet de me transcender« .
On ne pas aller bien loin tant qu’on n’est pas en paix avec soi-même. Ce qui suppose de se connaître et de s’accepter, sans loucher sur les qualités du voisin.
Ne pas faire la course avant la course :
Pour se préparer mentalement, le nageur essaie le plus possible de se déconnecter de l’enjeu, de ne pas visualiser sa course, de vivre dans l’instant présent. Entre les qualifications et les finales, il se détend, lit des mangas, regarde des séries pour se « vider la tête ». À la fin de la journée, seule la joie du temps passé dans l’eau compte. « C’est un sport, c’est de la piscine, rappelle-t-il. On ne va pas se mentir, ce n’est pas non plus ce qui va changer ma vie. »
Respirer avec la cohérence cardiaque : « Ça permet de libérer mon potentiel ». La cohérence cardiaque est une pratique anti-stress simple à mettre en place et d’un très bon rapport temps/efficacité. Je la recommande à tous mes élèves anxieux.
Quel bonheur de retrouver les conseils que je donne à mes élèves pendant les stages de méthodologie dans le témoignage d’un jeune champion olympique !