Ma voix m'a ouvert la voie
Longtemps j’ai été fâchée avec ma voix.
Je la jugeais trop fluette, trop aiguë, mal posée. Ainsi équipée, impossible de parler fort sans crier. Dans le brouhaha des conversations, je suis inaudible. D’où mon peu d’attrait pour les cocktails, les tablées trop nombreuses et la musique d’ambiance dans les restaurants. J’ai même hésité à m’engager dans la formation à cause de ma voix, me disant que je ne parviendrais jamais à parler longtemps à un groupe. Comment enseigner quand on manque de voix ?
Mon inscription à une chorale a tout changé. J’y suis allée par curiosité, persuadée d’être virée à la première audition. Hélène, la cheffe de chœur, m’a rassurée : « Tu chantes juste. Prends confiance et travaille, tout se passera bien. »
Un potentiel à découvrir
Entourée de chanteurs expérimentés, je craignais de ne pas être à la hauteur. Cependant, assez vite, quelque chose d’inattendu s’est produit. J’ai découvert le potentiel caché de ma voix. Au fil des séances, j’ai appris à chanter de poitrine plutôt que de tête, à augmenter ma puissance sans dérailler, à moduler. Ça donne des frissons de chanter en place. En travaillant ma respiration, j’ai compris comment placer ma voix pour ne plus me fatiguer inutilement. J’ai aussi appris à écouter, à me détendre, et ça a tout changé. J’ai progressivement pris confiance en moi. Cette nouvelle assurance s’est révélée précieuse dans mon métier de formatrice. Je peux aujourd’hui assurer sept heures de cours sans m’épuiser. La force de conviction repose autant sur la solidité de sa voix que sur les arguments.
À chacun sa voix
Peu à peu je me suis réconciliée avec ma voix. J’ai cessé de vouloir être autre chose que moi-même. Chaque voix est un instrument unique qui possède sa couleur, sa vibration, son timbre, sa profondeur, sa personnalité. J’ai accepté de n’être ni une clarinette, ni un hautbois, mais une simple flûte qui contribue à l’harmonie de l’ensemble. Mon bonheur consiste à jouer chaque jour un peu mieux de mon instrument, à en découvrir les infinies possibilités. Finalement à l’aimer, pour mieux donner.
La voix ne ment pas
Au-delà de mon propre parcours, cette expérience m’a rendue particulièrement sensible à la voix des orateurs. Mon oreille s’est affinée, je peux deviner l’incohérence d’un propos à la voix et détecter l’état émotionnel de mes proches au bout de quelques phrases. Lorsque je prépare des élèves à l’oral, je cherche leur cohérence. Il ne s’agit pas seulement d’apprendre à articuler ou à parler juste, mais de découvrir sa personnalité et d’apprendre à s’accepter tel qu’on est. Travailler sa voix, c’est travailler en vérité sur soi-même, pour trouver sa voie.
La voix est une clé formidable qui ouvre des portes secrètes, conduit à soi-même et aux autres.